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Victor

A Kyoto, quand vient le soir…

June 29, 2010 - Victor


Le sanctuaire Fushimi Inari, un de mes favoris du Japon...

Je marche, caressant le sol a chaque pas, cherche a flotter pour eviter le moindre bruit. Les nuages filtrent la lumiere du crepuscule et eclairent d’un bleu sombre et epais le plafond des ruelles ou je me trouve. D’aveugles fenetres distillent une lumiere venue de l’interieur, invariablement jaunatre, et parent les details de chaque entree: enseignes, plantes, animaux de faience, d’une lueur de mystere.

De loin me viennent les frissons etouffes d’un ruisseau; le chemin tortueux que je suis s’invente a chaque instant, et disparait aussitot derriere moi. Les aigles et les corbeaux tournoyants de l’apres-midi clair se sont tus. caches Dieu sait ou; le Kyoto silencieux du soir n’appartient qu’au reve.

A peine au Japon, les habitudes reprennent, tout devient familier et naturel. Prendre un train, un bus, passer des consignes au restaurant; les larges sourires de bienvenue, partout. J’aurais aussi bien pu quitter le pays hier. Pour finir, sur une initiative de Simon, on se loue des velos. Comme avant, disais-je !

... tout comme les jardins du Ginkakuji, Temple d'Argent.

C’est heureux: la ville a, semble-t-il, ete inventee pour eux. Des quais de Sanjo, ou l’on admire un des artistes de qui s’y succedent, remonter le cours de la riviere Kamo jusqu’a notre nouvelle maison, dans les hauteurs du Nord, est un vrai plaisir. Merci a Nicolas, ami de l’an dernier, pour nous heberger si bien la bas -et nous ceder son ordinateur, quasiment en permanence !

Comment raconter Kyoto, la splendeur de ses jardins, l’intimite des sanctuaires; l’ambiance si particuliere qui y regne ? Laquelle a bien fini par me coller a la peau et revient, comme une fine couche de poussiere, s’y fixer des mon retour. Mes descriptions, je le sens bien, auront forcement un petit gout de recuit; des histoires otees de leur prime fraicheur de la decouverte, delavees par le long bain solitaire que j’ai pris ici l’an passe. Et puis, il y a deja un blog a ce propos, n’est-ce-pas ?

A Kyoto, les bords de la riviere sont tranquilles.

Et le velo est partout.

Plus nouveau deja, notre voyage vers le sanctuaire d’Ise, a bicyclette. Ou plutot, notre essai…

Surpris par la pluie des le premier jour, nous mettons quelque neuf heures -avec des pauses toujours bien differentes-  a rejoindre une ville toute proche, Uji. Bien connue pour son the et certain temple, mais c’est une autre histoire… On n’y arrive pas specialement pour la visiter, ce soir-la ! On rentrera trempes chez Nicolas; pour reprendre, inc’h Allah ! la route le lendemain. Lorsque le soleil brille, rejoindre Nara a travers champs, ce n’est pas si difficile. Une petite cinquantaine de kilometres maximum.

Le genre de train monowagon a prendre pour les destinations minuscules ou nous posons les pieds.

Sur la route, quand il fait beau...

Avant de continuer, bref point historique: Nara est une des villes les plus chargeees d’histoire du Japon. Capitale imperiale avant Kyoto, donc avant Tokyo, la ville est presque entierement classe au patrimoine mondial de l’Unesco. La zone sans conteste la plus fameuse est le Nara Park, ou se dresse le Todai-Ji (litteralement, si mon japonais se tient a carreau, le « Grand Temple principal » !) qui est par la meme occasion le plus grand temple entierement en bois du monde; non loin paissent, en liberte, des biches voraces libres d’agresser quiconque a le malheur de tenir ne serait-ce qu’un bout de papier en main. S »y cachent aussi de nombreux temples et sanctuaires secondaires. Plus loin dans la ville, existent aussi les anciennes residences imperiales et le Horyu-Ji, le plus vieux, cette fois, temple en bois du monde. Tout un programme ! Le soir de notre arrivee, on se balade, tourne avec curiosite autour des temples, et l’on se deniche un coin paisible ou passer la nuit. On ne peut mieux place: un carre d’arbres au milieu du parc, sous le regard fixe et argente des biches.

Les allees du parc de Nara, millenaires...

Le lendemain, ayant constate la distance et les trois ou quatre montagnes -salete de pays !- qu’il reste a franchir pour rejoindre Ise, il est courageusement decide de s’y rendre en train. Le sanctuaire shinto, i.e. animiste le plus important du Japon -eh, dedie a Amaterasu, la divinite-lumiere, ascendence de la lignee infaillible des empereurs du Japon- deroute au premier abord. En effet, impossible d’y penetrer: on n’en admire que le portail. Cependant, place au coeur d’une foret elle aussi sacree, selon un agencement bien precis, il s’en degage un je-ne-sais quoi, une poisseuse ambiance mystique qui epaissit les lieux pourtant vides. On dormira quelques kilometres plus loin, au bord de la mer, caches dans l’enceinte d’un minuscule sanctuaire de plage.

La foret qui entoure le temple d'Ise, magique. Dit-on...

Les portes, ou dorii, simboles de purete, abondent dans les sanctuaires shinto.

Le retour a velo de Nara sera particulier a plusieurs points de vue. La pluie menace et d’ailleurs, elle tombe; nous sortons tout juste de Nara lorsque l’on croise un bien curieux personnage. Chemise hawaienne et chapeau bleu, longue barbe blanche, il me fait signe de la main. « Come on aboard, fellas… I’m the captain on my deck ! » (Venez a bord, compagnons… Je suis le capitaine sur mon pont !) Bien sur, nous le suivons.

Nous voila attables sur son « pont », bref, sa terrasse; de la maison qu’il a construit de ses mains et qui est, ma foi, extremement bien faite. Il faut dire que l’homme est artisan de metier depuis une bonne quarantaine d’annees, de la menuiserie a la ferronerie, en passant par la poterie. Il nous sert le vin de son ami Sigmund, « Stig », un suisse bien plus allume encore. Celui-la est fermement persuade d’etre le troisieme grand prophete apres Jesus-Christ et Moise, et attend avec ferveur l’Apocalypse du 21 Decembre 2012. Tres bien. D’ailleurs, ses discussions-monologues n’ont absolument aucun sens.

Stuart l'anglais, et son copain, Sigmund le suisse.

Quant a notre ami, Stuart, c’est un anglais hippie et motard, un vrai de vrai, de ceux qu’ »on en fait plus ». Dans la cuisine devastee d’un type qui organisait une after party trance en banlieue de Dublin, j’avais deja eu l’occasion de croiser un de ces british a longue barbe, qui peuvent vous parler d’a peu pres tout. Comme quoi, ils s’adaptent vraiment a n’importe quoi. « Le plus sympathique de tous les anglais ! », m’assure Stig. De son autoradio, le vieux rock de BBC Radio 2 rythme l’apres-midi.

Apres quatre heures de joyeuse « discussion », nos nouveaux amis nous ramenent, velos dans le camion a fruits, a… Takanohara. Si l’on m’avait dit qu’au cours de mes vingt petits jours au Japon, je reverrais ce trou de beton au milieu des champs dans lequel j’ai habite trois mois durant l’an dernier avant de le fuir pour Kyoto, je ne l’aurais pas cru. Je passe sur notre rage a vouloir rentrer malgre la pluie battante et la nuit tombee. On a laisse tomber finalement. J’en viens a ce qui arrive juste apres, c’est-a-dire Virginie.

Pour ceux qui connaissent... Si, j'y suis retourne ! Takanohara 2010 !

Au fond, Meteo-Iwa, une corde tendue entre deux rochers dans la mer. Symbole de mariage. On dort a deux pas de la, dans un minuscule sanctuaire.

Simon deboule par la fenetre dans ma chambre au petit matin; ma nuit, pour des raisons oubliees, a ete courte, mais ca y est, son amie est la depuis hier soir, donc je file sous la douche me preparer un peu. Et puis, c’est le 21, mon anniversaire, s’agirait d’etre un minimum presentable ! Malgre le decalage horaire, elle semble sur un nuage de se retrouver au Japon. Enfin, revoir Simon doit bien y etre pour quelque chose aussi.

On aura un beau programme pour cette occasion: visite du sanctuaire Inari, aux milliers de portes rouges aui courent dans la montagne, dedie au Renard, puis aperitif sur les bords de la riviere, dans le centre; on y deballe mes merveilleux petits cadeaux et des lettres toutes fraiches de France, souffle dans un mini vuvuzela -le tout apporte par Virginie. Et puis ainsi, on a meme la chance de manger un peu de saucisson ! Enfin, on enchaine mon restaurant de sushis favoris, mon bar prefere et un bon gros karaoke ! La nuit revient assez cher, j’ai mal pour les bourses de mes compagnons, mais la soiree etait vraiment reussie. Cadeau final, je discute avec mon amoureuse en direct via Internet. Je vois un peu double, mais comme elle est tres belle, ca ne gene pas. Je me dis que tout de meme, 70% des gens s’en ficheront bien de tout ce paragraphe-la… Tant pis !

Au karaoke, debout sur les banquettes comme il se doit !

Bref, c’est apres ces histoires un peu nebuleuses, teintees de sauce soja et d’umeshu, la liqueur de prunes japonaise, que je termine mes noubvelles aventures a Kyoto et pars, seul cette fois, m’embarquer pour une destination bien inconnue la grande ile du Nord, Hokkaido, sous la neige six mois par an, et ses paysages de landes immenses. Hokkaido, ce n’est pas le Japon, parait-il; il faut bien aller verifier. Encore un bateau, qui part d’une toute petite bourgade au Nord de Kyoto, de l’autre cote de la montagne qui ceinture les trois quarts de la ville. Cette fois, c’est l’inconnu.

Et c'est reparti...

Grande premiere: je m'essaie au seche cheveux sur le bateau. Et oui, je me suis rase, j'en avais marre.

Tout autour de nous, vingt heures durant, la mer...

Et voila pour les photos bonus, j’essaye de ne pas en mettre trop a chaque fois, mais…

Jeune ecoliere dans un train perdu

HeyHey, c'est Hako, le patron du ING, mon bar rock prefere... Apres six mois, il m'a reconnu immediatement ! Bon client, moi ? :)

C'est a cause de mamies japonaises comme celle-la que le thon rouge disparait. Bust'em !

Les rizieres accolent vraiment les maisons, partout.

Toujours pas compris le message ou l'interet de cette pub. Le message doit etre trop simple surement. Dites moi pas que c'est premier degre...

Beware of the deers: panneau expliquant les diverses techniques d'attaque du terrible animal.

Aaaah, les toilettes a la japonaise... Ca m'avait manque !

Des gares vraiment paumees. 4 trains par jour.

Le superbe temps sur chaque ile du Japon, prevu pour la semaine de notre voyage, tire d'un veridique journal.

Un artiste de rue au bord du fleuve a Sanjo, Kyoto: celui-ci dessine et peint sur fond de techno, suivant les pulsations. Et il est doue, mais surtout il s'amuse...


Un heron au confluent des deux rivieres du Nord, a Kyoto; plus bas, c'est la Kamo, le veritable fleuve de la ville.

Encore une fois, les japonais repriment bizarrement. Boire, OK; polluer, OK; jouer au golf, pas question !

Et tu vois maman, j'y suis alle, a cette auberge traditionnelle (Ryokan) pour mon anniversaire !